○○ 01 : Depuis tout petit, ma couleur préférée est le rouge. J’ai tendance à porter cette couleur par petite touche, mais je la chéris parmi toutes les autres.

○○ 02 : Mon grand frère a toujours été un modèle pour moi et c’est à lui que je me suis raccroché lors de la mort de notre mère. Il a été celui qui s’est occupé de moi à sa majorité et bien que je ne suis pas le petit frère parfait, j’aime mon frère et je ferais tout pour lui.

○○ 03 : Je sais que je n’étais pas le fautif lors de cet accident, mais pourtant, je me suis toujours senti coupable. Si ma mère ne m’avait pas retenu, elle serait encore là, et n’aurait pas laissé mon frère seul, avec les responsabilités dont il a dû faire face. Elle me manque et parfois, quand je me regarde dans un miroir, j’ai l’impression de la revoir. Elle qui avait des cheveux bouclés, un corps aussi fin et élégant que moi...  

○○ 04 : Je ne suis pas le mec le plus intellectuel, mais je ne suis pas un idiot pour autant. Et pourtant la drogue détruit le peu de neurone que j’ai et je le sais. Mais ça me permet aussi de lâcher prise et d’aimer que des hommes posent les mains sur moi-même si physiquement, ils ne me plaisent pas. L’inconvénient dans mon métier, c’est que je dois être souriant et réceptif même si le client n’est pas ce que j’aime.  

○○ 05 : J’ai toujours eu envie de protéger mon frère et c’est ce que je fais actuellement. Il ignore la vérité sur notre mère, sur les dettes qu’elle a accumulées pour nous élever et que je me suis engagées pour les rembourser. Lui, il vit sa vie d’ouvrier, de menuisier, il ignore ce que je fais et où je suis. J’espère qu’il sera, un jour, heureux et trouvera l’amour. Malheureusement, je ne pourrais jamais en faire partie, car je me suis promis de le garder loin de mon monde, de mon travail.

○○ 06 : Je suis accro aux drogues depuis l’âge de 15 ans. C’est un mec qui m’a fait découvert cela, ainsi que le plaisir de la chair et j’ai compris que l’un avec l’autre, le plait énormément. A tels point que je ne couche jamais avec un client, sans avoir une certaine dose dans les veines. D’ailleurs, je sais que j’agrandis mes dettes à force d’en consommer, mais je n’y peux rien, je suis accro à ça. Surtout aux chocolats qui sont disposés dans les chambres, chaque couleur à ses effets et je sais très bien lequel je peux prendre selon le client du moment.

○○ 07 : Le sexe, j’aime les hommes et je même si j’aime être sous l’influence de drogue, je sais que seul le corps d’un homme me plaît. Rare sont les clientes qui me veulent, je crois que mon allure androgyne n’est pas forcément ce qu’on désire, par contre, je sais que je plais, car les demandes me concernant sont de plus en plus nombreuses. C’est facile d’écarter les cuisses et de tendre se fesses, mais parfois, je me dis qu’aucun homme ne voudra m’aimer moi. Je ne sais pas ce que ça fait d’aimer, la personne avec qui on baise, sans doute que je ne le serais jamais et pourtant, il y en a un que je désire...

○○ 08 : Zénon, mon mac, l’homme qui me résiste et que je convoitise depuis mon arrivé en tant que sirène. C’est un homme terriblement sexy, j’aimerais avoir son regard sur moi, autrement que comme une sirène qu’il doit gérer. J’aime lui tourner autour, l’aguicher et si seulement il acceptait de me rejoindre dans une des chambres, j’aimerais avoir avec lui, bien plus qu’une discussion. Il hante mon esprit et j’en viens même à penser à lui quand un client s’occupe de moi. J’aimerais sentir ses mains sur mon corps, goûter à ses lèvres, mais il n’est pas réceptif. Je le sais et pourtant, ça ne m’empêche pas de le désirer, de l’aimer… Un amour que je garde secret, car je n’ai pas envie qu’il me repousse. De toute façon, je ne suis qu’une sirène non ?

○○ 09 : Mon corps ne comporte aucune marque, ni tatouage, ni piercing et lorsque j’ai un client un peu particulier, j’essaie d’éviter les marques. Je n’aime pas qu’on me marque, je n’appartiens à personnes et quand un client veut apposer sa marque, je suis capable de piqué une crise, car ce n’est pas parce que j’accepte ses mains sur moi, que mon corps lui appartient. Après tout, s’il y en a un qui peut dire que je lui appartiens, c’est Lou. Sur le papier, je suis à lui. Je travaille pour lui, mais quelque part, mon cœur ne lui appartiendra jamais.  

○○ 10 : Si mon corps se monnaie, on peut m’admirer, danser et me déhancher sans aucune honte. Je ne suis pas un pro, mais je sais me dandiner, et cela semble plaire à de nombreux clients qui n’hésitent pas à glisser quelques billets sous l’élastique de mon tanga. J'ai attisé le désir d’homme qui m’observe et ainsi, leurs soufflés l’envie de monnayer mes services.

Charleston, c’est la ville où j’ai vu le jour en 2004. Ma mère, une femme à la chevelure brune, frisée, aux regards bleutés, a eu le courage d’élever seule ses deux fils. Mon grand frère, âgé de 5 ans de plus que moi, n’ai pas du tout le même physique que notre mère, ni que moi, qui suis son portrait craché. Très tôt, il a émis l’idée que nous n’avions pas le même père, mais sur ce sujet, notre mère a toujours gardé le secret. Si bien, qu’en étant plus jeune, j’ai trouvé une photo d’elle accompagnée d’un charmant jeune homme. Un homme à l’allure élégante, aux regards d’un bleu pénétrant, un homme qui en impose sans rien demandé. Un homme que j’ai fantasmé, que j’ai pris pour modèle, pour père... Alors que je n’aurais jamais la réponse sur mon imagination parfois trop débordante. Ma mère ignore que je racontais à tous mes copains du quartier, que mon père était un homme riche, un homme d’affaires important qui voyager beaucoup et que c’est pour cela qu’il n’était pas beaucoup présent. À vrai dire, je n’ai jamais connu un homme qui aurait pu prendre la place d’un père. La seule figure masculine que j’ai connue, c’est celle de mon grand frère. Un frère qui est différent de moi, physiquement, mais aussi mentalement. Il est le genre de garçon à être studieux, il est calme et sage, ce qui lui vaut d’être le chouchou de notre mère. Du moins, de mon point de vue, il a toujours été le petit chouchou. L’enfant parfait, et à en croire les paroles de ma mère, le digne fils de son père. Mais qui est son père ? Est-ce le même que le mien ? On le connaît ? Jamais elle n’a répondu à mes questions et à la place de me répondre, elle préférait me gronder et me punir, afin que je cesse de l’importuner. Mais moi, j’ai toujours eu ce vide, cette envie de savoir qui je suis. Mais à part cette photo que j’ai trouvée en fouillant dans ses affaires, je n’ai rien. Et je ne sais même pas si cet homme, a un quelconque lien avec moi. Et je n’aurais jamais de réponse…  

Un vendredi, alors qu’elle venait me rechercher de l’école où j’avais été convoqué dans le bureau du proviseur pour une énième dispute avec un autre élève, elle me gronde. On rentre à pied de l’école et sur le chemin, j’ai beau me justifier, elle ne cesse de me gronder. Et c’est la dernière chose que je me rappelle d’elle. Car sous le coup de la colère, je traverse la rue, en râlant, car elle est injuste avec moi, mais je n’avais pas regardé si une voiture arrivait, mais elle, si. Elle l’a vu, cette voiture qui fonçait sur moi. Je n’ai pas de souvenir précis de cet instant, car cela s'est passé si vite, que j’ai juste le souvenir d’être attiré en arrière, atterrissant sur mes fesses, mais la scène qui se déroule sous mes yeux m’a horrifié. Ma mère s’est projetée en avant pour inverser les places et ce n’est pas moi que la voiture a heurté, mais elle. Devant mes yeux, ma mère s’est faite envolée par cette voiture qui n’a même pas pris le temps de venir voir ce qui s’était passé, car il a pris la fuite. Moi, je me rappelle de hurlement, les miens. J’ai bondi sur le corps de ma mère, en hurlant, en pleurant, mais j’avais beau l’appeler, la serrant dans mes bras, le sang qui recouvrait le sol et mes vêtements, ne laissez pas de doute sur l’état de ma mère, mais je n’étais pas en état de réfléchir.

Ce que je me rappel, c’est de mon frère, qui est arrivé à l’hôpital et que j’ai serré dans mes bras, et qu’on a pleuré la mort de notre mère. À partir de ce jour, nos vies ont complètement changé. Il a eu le droit de garde en ce qui me concerne, car je n’avais que 13 ans à l’époque et lui venait à peine d’être majeur. Il a lâché ses études pour partir en apprentissage et se former en tant que menuisier. Un métier qui n’avait pas prévu, mais je sais qu’il l’a pris à cause de moi. Les factures s’accumulent, le loyer est à payer et il fallait manger. J’ai pris assez vite conscience de tout cela assez vite, car je suis tombé à plusieurs reprises sur des relances de facture, mais à mon niveau, je ne pouvais rien faire. Sauf peut-être sauté des repas, et être le moins gourmand possible.  

Je me suis toujours senti coupable pour la mort de notre mère, car si je n’avais pas été la cause de cette dispute en classe, elle n’aurait pas été convoquée chez le directeur et jamais on ne se serait disputé sur le chemin du retour. Je n’ai jamais été un petit voyou, mais j’étais le genre d’élève qui n’aime pas l'injustice et les moqueries gratuites. Et des moqueries, j’en ai souvent eu. De par mon physique assez frêle, de mes cheveux frisés qui me donner un genre assez androgyne et qui était la cible des bad boys de l’école.

Mon frère n’a jamais su que je glissais l’argent qu’il me donnait pour manger le midi, dans une boite qu’il cachait dans sa chambre, qui lui servait pour payer le loyer. D’ailleurs, j’ai vite découvert cette enveloppe pleine d’argent, déposé dans notre boite aux lettres. Des enveloppes que mon frère m’avait cachées l’existence, car cet argent, on ignore qui était l’émetteur, mais cet argent, on en avait besoin, pour vivre, pour survivre.  

Si mon frère se tue dans l’apprentissage de son futur métier, moi, j’étais censé reprendre ma vie comme si tout était normal. Mais franchement, ma vie n’avait plus rien de normal. Et je n’ai plus jamais retrouvé une vie “classique”. Je séchais les cours dès que c’était possible, interceptant les lettres de l’école, afin que mon frère en ignore l’existence, je sors chaque soir, avec des garçons peu fréquentables, mais qui semble aussi pommé que moi. Et c’est d’ailleurs avec eux que j’ai découvert la drogue sous toutes ses formes. Au début, c’était juste pour crâner, pour planer quelques secondes, mais j’ai vite compris que la vie était plus agréable quand j’ai l’esprit dans les nuages, oubliant ainsi la tristesse et la douleur que je ressentais. Bien sûr, mon frère ne l’a jamais su. J’arrivais à piquer quelques billets de cette enveloppe et je préférais me passer de repas, pour me payer ma dose.

D’ailleurs, je crois que c’est grâce à cela que j’ai accepté les mains de cet homme, sur moi. Ce soir-là, j’étais en boite, l’alcool et la drogue coulaient dans mes veines et ses mains sur moi m’ont directement plus. Un homme bien plus vieux que moi, car je frôlais les 15 ans alors que lui... j’ignore réellement son âge, mais il savait ce qu’il voulait et ce qu’il faisait. Si je ne me rappelle plus de son visage, par contre je me rappelle de ses mains. Ce soir-là, coincé dans la cabine d’un des toilettes, je me suis laissé aller et franchement, j’ai adoré. Je ne m’attendais pas à ce qu’il aille aussi loin, j’étais encore innocent à ce moment-là, mais il avait les mots et je l’ai laissé me prendre. J’ignore son nom, j’ignore tellement de choses, mais ce que j’ai compris ce soir-là, c’est que j’étais capable d’avoir du plaisir et d’en procurer. D’ailleurs, j’ai réitéré assez vite l’expérience, avec un autre homme, puis un autre... Bref, depuis ce jour, je sais ce que j’aime et ce que je veux. Et pour m’évader de cette vie triste, j’aime le mélange que me procure la drogue et le sexe. J’en deviens accro, si bien que j’ai perverti quelques mecs de mon école, qui en échange de faire mes devoirs, je leur donne du plaisir sous de diverses manières. Bien sûr, c’est un petit business qui était lucratif et j’arrivais à lier le plaisir et mes études, sans vraiment avoir d’espérance dans ce milieu. Car même si mon frère espérait me voir devenir un homme bien, peut être un futur avocat ou médecin, il n’en sera jamais question. Je n’ai jamais vraiment espéré à ce genre de chose.

Et quand un jour, un homme se présente chez nous, et m’explique que ma mère n’était pas vraiment celle que je croyais, quelle avait fait des dettes à cet homme et quel travaillé au Black Perle... J’ai réussi à convaincre cet homme, Lou Deathcrow  de me laisser rembourser ses dettes, que je ferais tout ce qu’il faut à condition qu’il ne dit rien à mon frère. Quelque part, je voulais le protéger de cette vérité, je voulais moi aussi être utile et le laisser vivre sa vie sans avoir encore plus d’ennuis. J’avais que 16 ans à l’époque où j’ai rencontré Lou, et il a accepté d’attendre ma majorité pour me laisser le rembourser. Je ne savais pas totalement dans quoi je m’engageais, mais Lou avait compris qu’il y avait du potentiel avec moi, même si la drogue faisait partie de ma vie.

À 18 ans, à peine majeur, j’ai quitté mon foyer pour venir vivre au Black Pearl. Mon frère ignore où je suis, ce que je fais. La seule chose qu’il sait, c’est que j’ai trouvé un job et que je ne reviendrais jamais. Et je n’avais pas menti. J’avais trouvé un job et je ne rentrerais jamais.  

Je n’aime pas forcément l’idée de vendre mon corps, mais j’ai accès à de la drogue et cela m’aide énormément à me détendre. Les premiers temps, c’était assez difficile, d’enchaîner les clients, mais je ne peux pas nier que je trouve un certain plaisir dans ce que je fais. Et même si j’ai besoin de la drogue pour assumer avec certains clients qui ne me plaisent pas, je me donne corps et âme dans mon travail.